La musique, pour beaucoup, commence par des notes, des accords.
Pour moi, elle naît de tout autre chose. Elle naît du bruit d’un train, du murmure d’une rue, du crissement des pas sur un sol. Cette une approche intuitive, libre et totalement hasardeuse. Elle consiste non pas à créer des mélodies ou des rythmes traditionnels, mais à tisser des atmosphères à partir de sons capturés dans l’instant.
Lorsque l’on n’a pas de formation musicale comme moi, la composition prend une autre forme. Elle devient une exploration des textures sonores, un jeu d’assemblage où les sons, issus de mon environnement immédiat, se rencontrent et se superposent.
Je me promène dehors avec un micro et j’essai de prêter attention à l'invisible, à l’inaperçu. Chaque son, chaque bruit capturé devient une brique, une pièce d'un puzzle sonore qui se construit à mesure que j’avance.
Ces sons ne sont pas arrangés pour être joués selon des règles ou des structures. Ils sont organisés dans le temps, placés là où ils font sens, là où ils résonnent, créant un univers sonore unique et pourtant familier.
Il ne s’agit pas ici de créer une "musique" dans le sens habituel, mais plutôt de donner forme à des sensations et faire naître comme je peux des paysages sonores.
Lecteurs K7 que j’ai modifié sur les préceptes du circuit bending. Ces machines, réinventées, deviennent des instruments à part entière, me permettant de jouer avec les sons d’une manière unique. Je rembobine, je joue, et chaque son trouvé devient une note de l’instant.
Leurs imperfections et leurs nuances me parlent, et j’en tire des atmosphères sonores qui me rappelle une autre époque une autre réalité.
Je fabrique également des machines sonores. Ce processus de détournement est au cœur de ma démarche. Un moteur n’est plus un simple moteur, il devient le cœur battant d’une créature sonore, un pulsar mécanique. Les rouages ne servent plus seulement à transmettre des forces, ils génèrent des rythmes, des textures, des vagues de sons qui se superposent et s’entrelacent. Les objets qui semblent, à première vue, inanimés, se métamorphosent en instruments de création.
Le son est ainsi sculpté par la mécanique, une matière vivante que l'on peut manipuler, ajuster, moduler. C’est dans l’imprévu de l’interaction entre chaque élément, dans le frottement des matériaux, que naît l’essence de l'atmosphère sonore que je cherche à créer.
Chaque machine que je construis devient un instrument capable de générer des ambiances, de convoquer des souvenirs et des émotions. Chaque installation devient une invitation à écouter autrement, à découvrir les sons cachés dans la mécanique, à explorer un univers où chaque vibration a sa propre poésie.
C’est dans ce mélange de pièces détournées et de moteurs que je tisse des atmosphères où l’étrangeté et l’inattendu prennent toute leur dimension. Ce n’est pas simplement une question de bruit il s’agit plutôt de tordre le réel, de le réinventer et d’en faire un langage à part entière.