Dans l’atelier, les outils travaillent avec précision, mais c’est le bois qui, à chaque instant, dicte la forme. La matière que j’emploie pour créer mes personnages est vivante, elle respire avec le temps. Chaque pièce d’écorce que je ramasse en forêt, chaque fragment de bois érodé par les intempéries porte en elle une mémoire. Une mémoire des saisons, des arbres et des éléments qui ont façonné son existence.
Ma démarche s'inscrit dans une quête d’équilibre entre mon imaginaire et l'environnement. Lorsque je me rends en forêt, je ne cherche pas simplement des matériaux bruts, mais des morceaux d’histoire, des fragments de vie, des choses que j’invente et imagine. L’écorce, dans sa texture, ses courbes, ses fissures, m’évoque un passage, une transformation. Chaque morceau ramassé cherche à trouver sa place dans un personnage en devenir. Ces figures sculptées ne sont pas simplement des objets, mais des êtres en dialogue avec la forêt.J’imagine mes personnages naître dans l’atelier, mais la véritable finalité se révèle sur le terrain, lorsque je les place à l’endroit même où j’ai trouvé les morceaux d’écorce. C'est là que l’histoire prend tout son sens.
En photographiant mes sculptures dans leur environnement d’origine, j’inscris l’œuvre dans une temporalité, un espace précis et figé. Chaque photo devient une archive vivante, une mémoire partagée entre la forêt, l’objet sculpté et l’observateur.
La forêt n’est pas un simple décor pour mes sculptures, elle est le véritable partenaire de cette démarche. En revenant sur les lieux où j’ai trouvé l’écorce, je donne à mes personnages une dimension de retour, de cycle qui se termine, la fin d’une odyssée. Je rends à l’environnement ce que je lui ai emprunté, sous une autre enveloppe, une nouvelle forme mais dans leur habitat originel. Et ainsi, à travers chaque sculpture, une histoire se tisse, celle de mon imaginaire, celle de la nature, de la matière et du temps.